VOLS DE REPRISE

Mon vrac de jeudi dernier ne m'a pas trop affecté moralement mais j'y pense quand même beaucoup. Et si... Bon, y'a pas eu de si. J'ai aussi reçu quelques mots gentils de copains qui s'inquiètent pour ma santé. Promis, juré, je ferai gaffe ! Euh, enfin... comme avant ! Quand Isa est rentrée de Paris le soir, le repas était prêt, le ménage était fait. Elle a tout de suite compris en voyant le parachute de secours étalé dans le garage, alors je lui ai raconté mon aventure sans trop en rajouter, histoire de ne pas trop l'inquiéter. Elle en apprendrait plus en lisant les articles sur mon blog. Bon, ça ne l’a pas trop speedée, on prévoit même d'aller faire des biplaces le week-end suivant. Vincent m'appelle vers 8 heures pour avoir des nouvelles. En fait, en arrière avec l'autre groupe et concentré à guider ses élèves, il n'a pas trop compris ce qui m'était arrivé. Ce n'est qu'après s'être posé en fin de journée qu'Hélène (c'est la fille qui m'a vu plonger) lui expliquera tous les détails. Il m'apprendra qu'ils ont eu beaucoup de mal à ressortir du vallon car le soleil s'étant caché un moment, la convection avait fortement diminué.

Le lendemain, j'ai sorti mon parapente et le secours pour les faire sécher (il y avait de la neige jusqu'au fond des caissons de bout d'aile). De plus, il faut que le secours soit bien sec avant d'être replié, histoire qu'il s'ouvre bien le jour où... Ouais, bon, vous n’allez pas recommencer ! Y'avait aussi des trucs à laver (vous vous rappelez la descente... sur les fesses...), le jean, les gants...

Samedi matin, je file voir Vincent à l'école qui m'a donné rendez-vous pour m'aider à replier mon secours (j'ai bien appris à le faire il y a déjà quelques années mais je ne me rappelle plus trop comment on fait, vu que finalement je ne m'en sers pas si souvent. Je me mets par terre une fois tous les vingt ans si ça peut vous rassurer !). Autant un parapente peut être vaguement roulé, puisqu'on va s'assurer avant de décoller que toutes les suspentes sont démêlées et que tout va bien, autant le secours doit respecter, comme tout parachute, un protocole précis de pliage, pour qu'il puisse s'ouvrir à coup sûr.

Quand tout cela est fait, je décide d’aller voler car est comme dans tous les sports un peu « dangereux » : après une gamelle, il ne faut pas trop traîner à y retourner, sinon ça devient de plus en plus difficile de s’y remettre. Je suis quand même un peu nerveux. J’étale ma voile, vérifie le suspentage et m’installe. Décollage face à la voile, j’ai les poignées de freins dans les mains, les élévateurs sont croisés comme d’habitude, mais quelque chose me chiffonne, sans pouvoir définir ce que c’est avec précision. Je me détache de ma sellette et recommence l’inspection de mon aile depuis le début. En fait, j’ai mal accroché un des deux mousquetons qui solidarise les élévateurs à la sellette, je lui ai fait faire un demi-tour de trop, ce n’est pas bien méchant et ça n’empêche pas de voler, mais ça ne m’arrive jamais… d’habitude. Je m’y reprendrai finalement trois fois avant de pouvoir décoller ! Stressé ? En l’air, je ne suis pas très à l’aise non plus, je jette fréquemment des coups d’œil rapides au-dessus de moi. Pourtant, l’air n’est pas plus agité que d’habitude… Bon ! Ca ira mieux la prochaine fois !

Je me balade une heure puis décide d’aller me reposer. Ce soir, ce sera barbecue, tranquillement avec une bière.

Le lendemain, comme la météo est toujours au beau, on décide d’aller faire des biplaces en famille. De plus, c’est la veille de la rentrée, il faut en profiter jusqu’au bout. On ira au col de la Forclaz car, comme je n’ai pas encore fait de biplaces cette année, je préfère aller là-bas, parce que l’atterrissage est immense et pardonne les petites erreurs d’appréciations de distance. Je commence avec Guillaume qui du haut de ses dix ans ne pèse que 30 et quelques kilos. Les deux, on est dans la fourchette basse autorisée pour mon aile (Bêta 3) et je préfère voler quand la masse d’air est encore calme, ça m’évite d’avoir à me lester de 10 litres d’eau supplémentaires.

Beau décollage, précis et efficace, comme je les aime. En l’air, tout est doux, feutré, glissé. J’adore cette sensation de plané et Guillaume semble apprécier. Je lui montre quelques détails du paysage, où on va atterrir, lui rappelle la procédure (simple) d’atterrissage. On se pose 20 minutes plus tard tout aussi calmement mais là, changement de décor : week-end américain, salon du jardinage… sans parler de la compétition de parapente qui était en préparation avant qu’on décolle (plusieurs dizaines d’ailles vont devoir décoller dans un très court laps de temps, autant dire qu’il y aura du monde dans le secteur). Il y a des voitures partout, de la musique… exactement ce qu’on ne vient pas chercher. On replie rapidement et je décide de m’avancer sur la route, en direction d’Isa qui doit venir nous faire une navette, ce qui nous permettra de nous replier rapidement sur le site de Planfait. La veille, il devait y avoir au moins 150 ailes, aujourd’hui, c’est le calme plat. Le deuxième vol sera pour Camille. Déco impeccable, mais dès la sortie, ça thermique tout de suite. On se balade un petit moment devant le déco (pour la caméra qu’Isa a dans les mains), ensuite on passe derrière, pour profiter des ascendances qui vont nous remonter aux dents de Lanfon.

Camille est ravie, curieuse de tout. Je lui explique les manœuvres, les règles de sécurité. Je lui demande aussi de me signaler toute aile qui approche de nous car comme elle est bien plus légère que moi, elle est positionnée légèrement au dessus de mon horizon et me bouche le paysage (il vaut mieux voler avec des gros, on voit nettement mieux). On enroule un thermique de manière assez serrée ; il va nous remonter à 2300 m au-dessus des dents (Camille me fait remarquer que c’est très agréable d’être ainsi penché vers l’intérieur du virage… c’est vrai, on dirait qu’on vole ! Je sens qu’elle sera une excellente pilote, calme et réfléchie).

Je la laisse ensuite piloter un moment. Elle peut ainsi apprécier la pression nécessaire dans les commandes pour engager un virage. Je lui fait faire quelques 360° bien serrés pour lui faire sentir le vent qui s’accélère et la tête qui se met à tourner très vite (pour éviter ça, il suffit de regarder un point fixe et d’en changer quand on le perd). On finit par un petit tour au-dessus du lac, puis par un atterrissage tranquille après une bonne heure de vol. Je finirai par un dernier vol avec Isa, empruntant à peu près le même trajet. Voler en bi et faire partager ces sensations de liberté est un plaisir immense. A l’inverse du vol solo, je ne me permets aucun écart avec la sécurité… Seul reste le plaisir du vol.